Simple, peu engageant et surtout très économique, le prêt représente pour beaucoup de clubs une alternative solide au transfert définitif. Mais pour un joueur prêté, ce n’est généralement pas signe d’une carrière stable. Pire, c’est souvent le début de la galère et de la précarité.
Dans le numéro 4 de substitute. retrouvez notre dossier complet sur les prêts, avec notamment un focus historique sur l’apparition des prêts dans le football moderne et un zoom sur le cas de Chelsea et sa loan army.
Nombre de prêts entre 2010 et 2019
Au cours des saisons étudiées, entre 2010 et 2019, les clubs de Ligue 1 ont effectué 743 mouvements de joueurs.
67% des prêts sont réalisés en été, contre 33% lors du mercato d’hiver. La tendance est à la hausse avec de plus en plus de mouvements temporaires réalisés par les clubs au fil des saisons.
Âge des joueurs prêtés
La tranche d’âge favorable à un prêt se situe logiquement entre 19 ans et 23 ans. Généralement, les jeunes joueurs ont besoin de temps de jeu pour s’aguerrir et le prêt est une excellente manière de le faire. De ce fait, 60% des joueurs prêtés ont 22 ans ou moins.
Sur la période, le plus jeune joueur à être parti en prêt est Adrien Rabiot (17 ans) en 2013 lors de son passage de six mois à Toulouse depuis le PSG. Au contraire, le joueur le plus âgé est Jérémie Janot prêté en 2012 par Saint-Etienne à Lorient à l’âge de 35 ans.
Clubs prêteurs et club emprunteurs
L’AS Monaco est le club qui compte le plus de mouvements de prêts sortants. C’est le reflet d’une politique sportive insufflée par Luis Campos basée sur le trading et l’achat de nombreux (jeunes) joueurs. Avec un effectif professionnel pléthorique, de nombreux joueurs se voient obligés d’aller glaner du temps de jeu ailleurs, et notamment dans le club satellite de la Principauté : le Cercle Brugges. Dans une moindre mesure, le club du LOSC s’est enfermé dans la même logique, surtout ces dernières saisons, avec l’arrivée de… Luis Campos à la tête de la politique sportive. Le principe est le même, avec un club belge affilié, celui du Royal Excelsior Mouscron. Paris, Rennes et Saint-Etienne complètent le top 5 des clubs qui effectuent le plus de prêts sortants.
Enfin, il est intéressant de noter que l’Olympique Lyonnais n’est que 8ème en mouvements sortants. Pour faire simple : les bons jeunes jouent, les moins prometteurs partent définitivement.
Si l’on retire les deux clubs satellites belges, Cercle Brugges et Royal Excelsior Mouscron, Caen, Le Havre et Nancy sont des clubs qui aiment s’appuyer sur des joueurs éphémères et qui font souvent le yoyo entre la Ligue 1 et la Ligue 2. Lien de cause à effet ?
Le prêt, et après ?
La saison qui suit un prêt est déterminante pour l’avenir du joueur dans son club propriétaire. Même s’ils font tout pour convaincre lors qu’ils sont cédés temporairement, on se rend compte que quasiment 75% des joueurs prêtés quittent leur club la saison +1.
Parmi ceux qui (re)partent, un tiers d’entre eux goûte à nouveau aux joies du prêt, tandis que 66% des joueurs quittent définitivement leur club propriétaire, soit via un transfert, soit librement.
Les heureux élus, ceux qui restent, sont finalement très rares à finir par s’y imposer la/les saison(s) suivante(s). Pour preuve : 60% d’entre eux jouent au moins 1 match, 27% jouent au moins 20 matchs et seulement 12% finiront par jouer au moins 50 matchs.
En se focalisant sur les joueurs de moins de 22 ans, partir en prêt c’est déjà anticiper un départ définitif de son club propriétaire. Ils ne sont que 30% à revenir au bercail la saison qui suit leur prêt.
Ceux qui repartent le font majoritairement définitivement. En effet, ils sont 42% à être prêtés de nouveau.
Parmi ceux qui restent dans leur club propriétaire, ils sont rares à s’y inscrire dans la durée. 14% d’entre eux y joueront au moins 50 matchs.
Seuls deux exemples notables sortent du lot : Alphonse Aréola et Gaëtan Laborde. Après avoir enchaîné les prêts (trois chacun) ils ont réussi à s’imposer dans leur club de base – Paris et Bordeaux – avec plus d’une cinquantaine de matchs. Avant de finalement partir définitivement.
Les serial-prêtés
Sur les 587 joueurs qui ont connu un prêt, 117 ont été prêté deux fois au moins au cours de la période sélectionnée. Ils sont 22 à avoir été prêtés au minimum trois fois. Seuls Youssouf Sabaly et Jean-Christophe Bahebeck, tous deux joueurs du Paris Saint-Germain, ont connu la chance (ou le malheur) d’être prêté quatre fois et plus.
Quelle(s) destination(s) ? Quelle(s) division(s) ?
Parmi les joueurs qui partent de leur club propriétaire en N+1, la grande majorité, soit 64%, reste en France. La Belgique est la destination étrangère préférée avec 9% de départs vers le Plat Pays. Suivent l’Espagne, l’Angleterre et l’Italie.
En France, la moitié des joueurs prêtés par des clubs de Ligue 1 partent en Ligue 2 la saison suivante. 30% restent en Ligue 1 et presque 17% descendent de deux étages pour aller en National 1.
Enfin, parmi les divisions étrangère les plus prisées, on retrouve la Jupiler League (D1 Belgique) à hauteur de 26%, la Liga (D1 Espagne) avec 15% et la Serie A (D1 Italie) avec 12%.
Malgrè tout, quelques réussites
Certains prêts ont pu servir deux objectifs distincts : préparer des jeunes en leur offrant du temps de jeu et relancer des plus âgés le temps d’une saison. Voici quelques réussites notables, en prenant en compte le nombre de matchs de Ligue 1 joués après être revenus dans leur club de base.
Moins de 22 ans
Adrien Rabiot / 144 matchs de L1 avec le PSG
17 ans, prêt à Toulouse en 2013
Ab. TOURE / 120 matchs de L1 avec Nantes
20 ans, prêt au Poiré s/Vie en 2015
Greg. SERTIC / 119 matchs de L1 avec Bordeaux
21 ans, prêt à Lens en 2010
Yacine BAMMOU / 117 matchs de L1 avec Nantes
22 ans, prêt à Luçon en 2014
Plus de 22 ans
Vincent ENYEAMA / 145 matchs de L1 avec Lille
30 ans, prêt au Maccabi TA en 2012
Jaro. PLASIL / 143 matchs de L1 avec Bordeaux
31 ans, prêt à Catania en 2013
Mustapha BAYAL / 106 matchs de L1 avec ASSE
26 ans, prêt à Nancy en 2012
FALCAO / 88 matchs de L1 avec Monaco
29 ans, prêt à Chelsea en 2015
Si partir en prêt depuis un club de Ligue 1 est statistiquement signe dans le futur d’instabilité et de carrière compliquée, quelques rares joueurs ont su tirer leur épingle du jeu pour réussir ensuite dans un autre club que celui qui les avait prêtés.
Ainsi, on peut citer Jonathan Ikoné, Odsonne Edouard et Youssouf Sabaly (Paris), Paul Bernardoni et Anthony Modeste (Bordeaux), Alan Saint-Maximin (Monaco), Alassane Pléa (Lyon), Yacine Brahimi (Rennes), Saïd Benrhama (Nice), Jordan Ayew (Marseille), Ludovic Ajorque (Angers) ou encore Andy Delort (Ajaccio) et Denis Bouanga (Lorient).
A consulter également : Le prêt, et après ? – Les Cahiers du Football
Le panel sélectionné pour l’infographie compte 743 mouvements de prêt. Un joueur peut avoir fait plusieurs mouvements. Les chiffres sont basés sur 9 saisons de Ligue 1 allant de 2010/2011 à 2018/2019 et comptant uniquement les prêts sortants. Chiffres arrêtés au 1er décembre 2020. Les données sont récoltées sur soccerway.fr