Ce soir, Bastia joue la deuxième finale de son histoire en Coupe de la Ligue. Face aux Corses se dresse en favori l’ogre Parisien qui est un vieil habitué de cette jeune compétition, avec cinq finales disputées pour quatre coupes glanées. Défaits une seule fois il y a 15 ans par Gueugnon alors pensionnaire de… deuxième division les hommes de Laurent Blanc sont prévenus, être favori ne suffira pas.
Nous sommes le 22 avril 2000, le Stade de France qui sent encore le neuf s’apprête à accueillir la 6ème finale de la Coupe de la Ligue. Une compétition toute jeune créée cinq ans plus tôt dans laquelle le PSG s’est déjà illustré à deux reprises (1995 et 1998). Dans le camp d’en face c’est beaucoup moins glamour, ça sent la province et la sueur. Les Forgerons de Gueugnon, petite ville de Bourgogne qui peine à atteindre les 10 000 âmes, sont pensionnaires de deuxième division et n’ont a priori aucune chance de soulever le trophée face aux Lama, Okocha, Benarbia et consorts. Pourtant depuis plusieurs jours il flotte dans les airs du football français un doux parfum de fraîcheur. Dix jours plus tôt, en Coupe de France, le club amateur de Calais (CFA) s’est épinglé Bordeaux pour s’offrir une finale historique face à Nantes. Ce match a tout d’un piège pour le PSG qui va forcément tomber dedans.
On ne peut rien contre le Distin
Sous les yeux de 77 000 spectacteurs, Eric Poulat lance les deux équipes dans la bataille. En se penchant sur les feuilles de match, on se dit quand même que si le PSG ne déconne pas trop il devrait repartir avec le trophée sous le bras. Après tout que valent les anonymes Bouzin, Fanzel, Chabert ou Neumann face aux stars Okocha, Benarbia, Robert et Christian ?

Si le doute n’habitait pas l’esprit des pronostiqueurs avant le match, il va pourtant rapidement occuper celui des hommes de Philippe Bergeroo au bout de quelques minutes. Le temps pour Marcelo Trapasso et surtout Stéphane Roda d’inquiéter Casagrande. Un peu plus tard dans cette première mi-temps, les Parisiens échappent de peu à la correctionnelle quand le vétéran Traoré se manque à son tour devant le gardien du PSG. Trop timides et pour la plupart invisibles, les protégés de Bergeroo se heurtent à une défense Bourguignonne solide incarnée par le jeune Sylvain Distin intraitable ce soir-là. Beau pied de nez pour ce défenseur dont les portes du monde professionnel s’étaient resserrées trois ans plus tôt, non conservé par le centre de formation du … Paris-Saint-Germain !
Deux coups de marteau sur la tête
Certainement bougés par Philippe Bergeroo dans les vestiaires à la pause, les Parisiens se montrent plus remuants mais pas plus dangereux que ça. Christian n’allume que des feux de paille qui n’inquiètent pas spécialement Richard Trivino le portier Jaune et Bleu. Inoffensifs et désorganisés, les franciliens ne renvoient pas l’image d’une équipe qui pointe à la 3ème place du championnat de D1 et qui vient de fouetter Lens (4-1) une semaine plus tôt.

Les Bourguignons poussés par 13 000 supporters qui garnissent le virage nord de l’enceinte de Saint-Denis ne se posent pas autant de questions quand il s’agit d’attaquer. En remontant rapidement le ballon, Gueugnon fait souffrir Yanovski, Aliou Cissé et El-Karkouri qui a force de plier vont finir par rompre. A la 66ème minute de la finale, le meneur de jeu Argentin Marcelo Trapasso fait basculer le match du côté des Forgerons en reprenant à bout portant un ballon relâché par Casagrande. Amorphes et incapable de se révolter, les coequipiers d’Eric Rabesandratana accusent le coup et frôlent la catastrophe deux minutes plus tard quand Amara Traoré parfaitement servi par Trapasso se rate inexplicablement dans une position pourtant idéale. Trop c’est trop pour Bergeroo qui fait rentrer Kaba Diawara pour apporter un peu de sang frais. Et c’est bien un remplaçant qui va se montrer à son avantage dans les dernières minutes, le jeune Sylvain Flauto dans son maillot trop large se joue de Ducrocq et Cissé pour terminer le PSG d’un tir croisé du gauche. Alex Dupont explose, le FC Gueugnon peut fêter l’apparition d’une deuxième ligne sur son palmarès et filer en Coupe UEFA la saison prochaine. Laurent Perpère, président d’un PSG suffisant refuse de serrer la main de ses joueurs lors de la remise des médailles. Philippe Bergeroo avait pourtant prévenu la veille : “L’important, c’est le trophée, le palmarès. On ne garde que le nom du vainqueur, on oublie celui du finaliste.”
Ironie de l’histoire, 15 ans plus tard après de multiples déboires et notamment une liquidation judiciaire et une relégation en DH, le FC Gueugnon se reconstruit en CFA 2 tandis que le PSG a fait son entrée dans les très hautes sphères du football mondial. Sylvain Distin lui court toujours à 37 ans à Everton où il est le premier joueur de champ étranger à atteindre les 400 matchs en Premier League.